Avec le lancement des offres commerciales 5G destinées au grand public, les opérateurs français promettent que le réseau mobile atteindra pour l’instant une capacité théorique maximale de 1 Gbps. Pour comparaison, en 4G, on parle plutôt de capacité atteignant les 300 Mbits. Cet article non technique est une compilation des informations importantes qui vous permettront, je l’espère, de mieux appréhender cette nouvelle génération des standards pour la téléphonie mobile.
Le rôle de l’ARCEP
En France, l’autorité administrative chargée de réguler les communications électroniques est l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse). Une de ses principales missions consiste en l’organisation des enchères pour la répartition des plages de fréquences entre les opérateurs Orange, SFR, Bouygues Télécom et Free. En effet, l’ARCEP est un affectataire local, qui attribue donc les ressources en fréquences ou en numérotation à destination des opérateurs téléphoniques. Il existe en tout 15 affectataires en France, chacun dans son domaine d’expertise. Par exemple, les fréquences liées à la télécommunication spatiale sont attribuées par le CNES.
Les dernières enchères proposées par l’ARCEP se sont déroulées du mardi 29 septembre 2020 au jeudi 1er octobre 2020 (initialement prévues en avril 2020). Elles visaient à distribuer parmi les quatre candidats 11 blocs de 10 MHz encore disponibles dans la bande 3,4 ‑ 3,8 GHz. Le prix de réserve déterminé par le Gouvernement était de 70 millions d’euros par bloc de 10 MHz. Mais pourquoi le Gouvernement est-il impliqué dans cette vente ? Il faut savoir que le spectre hertzien est considéré comme faisant partie du domaine public et appartient donc à l’État. Les opérateurs achètent ainsi à l’État (via l’ARCEP) une licence d’utilisation qui leur donne le droit d’exploiter techniquement et commercialement la ou les bandes louées pendant 15 ans.

Résultat des enchères 5G
Je rappelle que les dernières enchères dites « principales » de septembre-octobre 2020 ne concernent que les 310 MHz de fréquences de la bande 3,4-3,8 GHz qui étaient encore à attribuer à l’échelle de la métropole. Effectivement les quatre opérateurs ont déjà obtenu chacun un bloc de fréquences de 50 MHz contre des engagements « optionnels » vis-à-vis de la 5G et un paiement par bloc de 350 millions d’euros. En effet, l’ARCEP souhaite que les opérateurs répondent aux attentes des entreprises, des collectivités, et des administrations, améliorent la couverture à l’intérieur des bâtiments professionnels, développent l’accès fixe sur le réseau mobile (« box 5G »), renforcent la transparence concernant leur calendrier de déploiement, leur taux de pannes et ouvrent leur réseau 5G aux MVNO. Ces engagements bien qu’optionnels lors du dépôt des dossiers sont transformés en obligations lors de l’attribution effective des fréquences.
Ainsi, lors de ces enchères principales, les quatre opérateurs candidats eurent la possibilité d’acquérir des fréquences additionnelles par blocs de 10 MHz. Chaque candidat ne pouvant disposer que de 100 MHz au total (c’est-à-dire si on calcule bien, les 50 MHz issus de la première partie de la procédure expliquée au-dessus, et les 50 MHz de cette phase d’enchères). Enfin s’ensuivit une dernière enchère dite de « positionnement » le 20 octobre 2020 pour déterminer les préférences de position des opérateurs dans la bande.
Cette procédure des enchères 5G s’achèva le 12 novembre 2020 par la délivrance des autorisations d’utilisation de fréquences dans la bande 3,4-3,8 GHz aux opérateurs dont voici le récapitulatif :
Bouygues Télécom | Free Mobile | Orange | SFR | |
---|---|---|---|---|
Blocs « optionnels » | 1 x 50 MHz | 1 x 50 MHz | 1 x 50 MHz | 1 x 50 MHz |
Tarif par bloc « optionnel » | 350 millions € | 350 millions € | 350 millions € | 350 millions € |
Blocs supplémentaires demandés | 2 x 10 MHz | 2 x 10 MHz | 4 x 10 MHz | 3 x 10 MHz |
Total des fréquences (bande 3,4-3,8 GHz soit 310 MHz) | 70 MHz | 70 MHz | 90 MHz | 80 MHz |
Tarif par bloc demandé | 126 millions € | 126 millions € | 126 millions € | 126 millions € |
Enchère de positionnement | 0 € | 3 096 245 € | 0 € | 0 € |
Somme totale à verser à l’État | 602 000 000 € | 605 096 245 € | 854 000 000 € | 728 000 000 € |
Pour avoir des explications sur le fonctionnement de l’enchère de positionnement, vous pouvez consulter ce document. Pour faire simple, l’ARCEP attribue les lots de fréquences de façon contiguë pour chaque opérateur téléphonique ayant participé à l’enchère principale au sein de la bande 3490-3800 MHz. On entend par « positionnement » d’un lot de fréquences dans la bande, la place qu’il occupe dans la bande en partant du bas de la bande (de 3490 MHz + 10 MHz fois le nombre de blocs non attribués s’il y en a, ce qui n’est pas le cas pour ces enchères 5G). Le premier positionnement est donc celui occupé par le lot dont les fréquences sont les plus basses et logiquement, le dernier positionnement est celui occupé par le lot dont les fréquences sont les plus hautes.
Fréquences inférieures à 3490 MHz | Lot 1 (opérateur à déterminer) | Lot 2 (opérateur à déterminer) | Lot 3 (opérateur à déterminer) | Lot 4 (opérateur à déterminer) | Fréquences supérieures à 3800 MHz |
Il y a donc 24 permutations possibles des blocs de fréquences des opérateurs sur le spectre (factorielle de 4). L’ARCEP demande à chaque opérateur de remplir de son côté un document sur lequel figure les permutations qui l’intéressent additionnées d’une colonne indiquant le montant que l’opérateur est prêt à payer si cette permutation est retenue.
Supposons que l’opérateur Orange remplisse ce formulaire :
Position 1 (lot 1) | Position 2 (lot 2) | Position 3 (lot 3) | Position 4 (lot 4) | Montant |
---|---|---|---|---|
Bouygues Télécom | SFR | Free | Orange | 3 millions € |
Free | Bouygues Télécom | SFR | Orange | 1 millions € |
On peut interpréter ce formulaire ainsi : Orange semble intéressé pour figurer dans le bloc de fréquences le plus haut (soit de 3710 MHz à 3400 MHz puisque rappelons que l’entreprise a acheté un bloc de 90 MHz). En effet, elle est prête à débourser une certaine somme pour ces deux permutations. Par ailleurs, elle est très intéressée pour rester à côté du bloc de Free puisque le montant qu’elle accepte de débourser est plus élevé dans cette configuration. Toutes les autres permutations possibles sont automatiquement affublées d’un montant à 0 € par l’ARCEP.
Ensuite l’ARCEP récupère les 4 formulaires, additionne pour chaque permutation le montant proposé par les 4 opérateurs. La permutation gagnante est celle dont la somme des montants est la plus élevée. Un tirage au sort peut être effectué pour départager les éventuelles permutations ayant le même montant total.
Une fois la combinaison gagnante identifiée, le montant financier dû par chaque opérateur au titre de son positionnement dans la bande est défini par le montant minimal qu’il aurait dû indiquer sur la combinaison gagnante pour éviter qu’une autre combinaison soit retenue. Il s’agit de la différence (comprise entre 0 et le montant de l’offre faite par le l’opérateur pour la permutation gagnante) entre les deux valeurs suivantes :
- la valeur de la permutation qui aurait été sélectionnée si l’opérateur n’avait soumis aucune offre lors de cette enchère de positionnement (autrement dit s’il avait fait une offre à 0 sur toutes les permutations),
- la valeur de la permutation gagnante identifiée moins l’offre de l’opérateur sur cette combinaison.
Voici un exemple pour trois opérateurs engagés dans les enchères de positionnement :
Permutation | Position 1 | Position 2 | Position 3 | Offre opérateur A | Offre opérateur B | Offre opérateur C | Somme totale |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | A | B | C | 100 | 130 | 30 | 260 |
2 | A | C | B | 100 | 75 | 50 | 225 |
3 | B | A | C | 50 | 0 | 0 | 50 |
4 | B | C | A | 0 | 150 | 50 | 200 |
5 | C | A | B | 50 | 0 | 80 | 130 |
6 | C | B | A | 0 | 150 | 60 | 210 |
La permutation 1 est celle conservée définitivement par l’ARCEP puisque la somme des offres des opérateurs est la plus élevée. Calculons maintenant le montant final dû par chaque opérateur :
Opérateur A
S’il avait fait une offre à 0 sur toutes les permutations, la combinaison 6 aurait été gagnante (somme totale de 210). La combinaison gagnante 1 sans l’offre de l’opérateur vaut 160. Il s’acquitte alors au final de 210-160=50.
Opérateur B
S’il avait fait une offre à 0 sur toutes les permutations, la combinaison 2 aurait été gagnante (somme totale de 150). La combinaison gagnante 1 sans l’offre de l’opérateur vaut 130. Il s’acquitte alors au final de 150-130=20.
Opérateur C
S’il avait fait une offre à 0 sur toutes les permutations, la combinaison 1 resterait gagnante (somme totale de 230). La combinaison gagnante 1 sans l’offre de l’opérateur vaut 230. Il s’acquitte alors au final de 230-230=0.
On peut donc conclure que même si un opérateur n’a pas de frais de positionnement à payer, il peut très bien avoir proposé de l’argent pour se positionner sur le spectre. Le détail n’est pas publié par l’ARCEP. Vous connaissez maintenant le fonctionnement des enchères 5G qui ont eu lieu en septembre et octobre 2020 ! Il en résulte l’attribution des fréquences suivantes pour un total de 2 789 096 245 € versés à l’État :

Engagements des opérateurs
Outre les engagements « optionnels » pour l’obtention du bloc de 50 MHz (voir plus haut dans cet article), les opérateurs doivent également respecter un cahier des charges stricte pour le déploiement de la 5G en bande 3,4-3,8 GHz :
- 3000 sites déployés par opérateur en 2022,
- 8000 en 2024 (dont 2000 déployés en zone de déploiement prioritaire aussi appelée zone peu dense ou ZPD, définie dans la liste de l’ARCEP, et des communes des « territoires d’industrie » situées en dehors des unités urbaines de plus de 50000 habitants),
- 10500 en 2025 (dont 2625 en ZDP),
- capacité d’au moins 240 Mbits pour 75% des sites 4G+ en 2022,
- capacité d’au moins 240 Mbits pour 90% des sites 4G+ en 2025,
- capacité d’au moins 240 Mbits pour 100% des sites 4G+ en 2030,
- capacité d’au moins 100 Mbits pour 16642 km d’axes auto-routiers des sites 4G en 2025,
- capacité d’au moins 100 Mbits pour 54913km km d’axes routiers des sites 4G en 2030,
- activer les services différenciés 5G avant 2023 (on reviendra sur cette notion de slicing plus tard),
- généraliser IPv6.
Déploiement actuel des sites 5G
Bouygues Télécom | Free | Orange | SFR | |
---|---|---|---|---|
Nombre total de sites 5G | 1344 | 5303 | 646 | 278 |
Bande des 700-800 MHz | 0 | 5303 | 0 | 0 |
Bande des 1800-2100 MHz | 1323 | 0 | 176 | 181 |
Bande des 3,4-3,8 MHz | 115 | 221 | 475 | 97 |
Bande des 26 GHz | N/A | N/A | N/A | N/A |
Nombre de sites multi-bandes | 94 | 221 | 5 | 0 |
Ces chiffres ne concernent que les sites ouverts commercialement. Ils doivent évidemment être interprétés en fonction des bandes utilisées. Le total représente les sites uniques qui sont parfois multi-bandes, il n’y a donc pas d’erreur dans l’addition. On verra plus tard pourquoi la bande des 26 GHz n’est pas encore disponible commercialement en France. Pour plus d’information sur le déploiement région par région ainsi que sur les sites équipés en 4G+, se rendre ici.
Un autre acteur des fréquences : l’ANFR
Là où l’ARCEP est considéré comme le « gendarme » des télécoms, l’ANFR (Agence Nationale des Fréquences), a pour mission de négocier, au niveau international, les futurs usages des bandes de fréquences et de défendre les positions françaises. Elle autorise également toutes les implantations de sites d’émission (>5 watts) sur le territoire national et s’assure du respect des limites d’exposition du public aux ondes. Pour cela, elle contrôle l’utilisation des fréquences et assure une bonne cohabitation de leurs usages par l’ensemble des utilisateurs. Concrètement, l’ARCEP joue le rôle de régulateur et de contrôleur des obligations juridiques des opérateurs téléphoniques (entre autres) tandis que l’ANFR est son équivalent technique. Par exemple, si la réception de la TNT est insuffisante à votre domicile et que ceci n’est pas lié à votre installation, c’est l’ANFR qui interviendra.

Le spectre 5G en France
Il est difficile de déterminer avec précision et de façon exhaustive quelles fréquences sont utilisées par la technologie 5G, notamment parce qu’elles varient fortement d’un pays à l’autre et même d’un opérateur à l’autre. À termes, au moins trois bandes de fréquences 5G seront utilisées par le réseau mobile français. En outre, il est important de comprendre que les générations de technologies mobiles ont été conçue indépendamment des bandes de fréquences utilisées. C’est pourquoi il y a des tentatives d’harmonisation des fréquences en fonction des technologies utilisées, d’abord au niveau européen (via le RSPG) puis au niveau mondial (via l’ITU-R).
Pour les bandes 4G et 5G utilisées dans le monde, je vous invite à consulter ce document de Qualcomm. Concernant l’intégralité des bandes, toute génération confondue, actuellement exploitées par les opérateurs français, se référer à ce document.

Bande des 700 MHz
La bande des 700 MHz (694-790 MHz exactement, aussi appelée Bande 28 ou n28) est déjà bien connue. Elle était occupée pour la diffusion de la TNT (qui allait de 470 MHz à 790 MHz). Elle fut transférée progressivement au secteur des télécommunications du 5 avril 2016 au 25 juin 2019 comme le montre la carte ci-dessous. Ce changement de fréquences fut associé à la généralisation de la norme de codage d’objets audiovisuels MPEG-4, au passage à la TNT HD et à la diminution du nombre de canaux disponibles pour la TNT.

Cette bande de 700 MHz a une grande longueur d’ondes ce qui implique une grande portée, d’environ 2 km en zone urbaine (avec obstacles) et 8 km en zone rurale (peu d’obstacles). Elle pénètre bien dans les bâtiments. À contrario, la capacité de cette bande est faible. Elle ne permet pas de focaliser le faisceau hertzien sur une zone donnée (Beamforming ou filtrage spatial).
Comme pour la bande 3,4-3,8 MHz, il y a également eu un processus d’enchères « principales » organisé par l’ARCEP, les 16 et 17 novembre 2015. Six blocs de fréquences de 5 MHz duplex étaient en jeu pour un prix de réserve fixé par le Gouvernement à 416 millions d’euros par bloc. Au total, les opérateurs ont versé à l’État (sans intégrer les enchères de positionnement), au titre des redevances pour l’utilisation des fréquences, la somme de 2 798 976 324 €. Le 8 décembre 2015, l’ARCEP a délivré aux quatre opérateurs une autorisation d’utilisation des fréquences dans cette bande pour délivrer leur 4G. Le résultat final de la répartition est représentée ci-dessous :

Vous avez probablement remarqué le « trou » entre les 733 MHz et 758 MHz. D’après le TNRBF (Tableau national de répartition des bandes de fréquences), cette zone fréquentielle est segmentée en trois partie toute pour du MXA (mobile sauf mobile aéronautique) :
733-736 MHz
Bande appartenant au Ministère de l’intérieur dont il est l’affectataire exclusif.
736-753 MHz
Bande appartenant à l’ARCEP dont elle est l’affectataire exclusive.
753-758 MHz
Bande appartenant au Ministère de l’intérieur dont il est l’affectataire exclusif.
Cette bande est beaucoup plus utilisée par Free que les autres opérateurs pour délivrer sa 4G. L’entreprise utilise la technique dite du « re-farming » afin de proposer sa 5G. Ce terme désigne la réaffectation des bandes de fréquences qui ont été historiquement attribuées aux services mobiles d’anciennes générations vers une génération plus récente (dans le cas de Free, 4G vers 5G).
Bande des 3,4-3,8 GHz
Cette bande fait beaucoup parler d’elle parce qu’elle a récemment été médiatisée lors des enchères de l’ARCEP de septembre à octobre 2020. Elle est régulièrement affublée de « bande-cœur » 5G puisque c’est cette technologie uniquement qui transitera sur ces fréquences.
Fixée entre 3490 et 3800 MHz exactement (bandes n77 et n78), elle a une longueur d’ondes moyenne ce qui implique aussi une portée moyenne, d’environ 600 m en zone urbaine et 1,2 km en zone rurale. Elle a des difficultés à entrer dans les bâtiments. Cependant, sa capacité est élevée. Elle est compatible avec le Beamforming. La 5G transitant notamment par les bandes 700 MHz et 3,4-3,8 GHz est qualifiée dans la littérature de « 5G sub-6 ».
Bande des 26 GHz
Avec cette bande (24,25-27,5 GHz soit 1 GHz actuellement disponible), on parle de 5G millimétrique ou 5G mmWave. Puisqu’il s’agit d’une onde très haute fréquence, sa portée est très faible, de 150 à 200 mètres en milieu urbain mais sa capacité est maximale puisqu’elle pourrait atteindre 10 Gbps en théorie ! Elle n’est pas encore attribuée aux opérateurs par l’ARCEP, qui lancera un nouveau tour d’enchères. Elle est compatible avec le Beamforming. Il ne faut aucun obstacle entre l’antenne et le périphérique de réception sous peine de ne plus pouvoir capter. Même la pluie dégrade fortement ses performances. Ces fréquences répondront aux services ayant besoin d’une bande passante élevée comme le multimédia augmenté ou encore la gestion d’outils industriels dans les usines.
En septembre 2020, les entreprises Ericsson et Qualcomm ont annoncé détenir un record de distance d’échange de données entre un émetteur et un récepteur avec 5 km parcourus sans relais dans cette bande. La communication a été réalisée entre un équipement 5G Ericsson standard comportant une mise à jour logicielle étendant sa portée et un équipement CPE 5G intégrant un modem Snapdragon X55 et des modules d’antenne QTM527 de Qualcomm.

Côté record de bande passante en conditions réelles, Ericsson a annoncé mi-octobre 2020 atteindre des débits très impressionnants de 5,06 Gbps sur le réseau Verizon en 5G millimétrique. Dans le futur, l’entreprise américaine de télécommunications aimerait atteindre :
- une capacité de 10 Gbps,
- une latence sous les 5 millisecondes,
- des connexions stables jusqu’à 500 km/h,
- gérer un million de périphériques par km2,
- transférer 10 Tbps/km2.
Le record expérimental de bande passante est quant à lui détenu par Samsung. Il a été réalisé à la Digital City, le nom du QG de Samsung à une vingtaine de kilomètres au sud de Séoul. L’entreprise a utilisé pour cela la technologie Multi-User MIMO (MU-MIMO) qui permet de partager la capacité radio et d’émettre des flux de données vers un utilisateur en exploitant par exemple 2 antennes en émission et 2 antennes sur chaque terminal. Ceci a permis d’atteindre approximativement 4.3 Gbps en émission, soit 8.5 Gbps sur le terminal.
En France, les enchères d’attribution des fréquences de 5G millimétrique ne sont pas encore prévues. L’ARCEP a toutefois autorisé de premiers acteurs à exploiter des plateformes d’expérimentation 5G ouvertes en bande 26 GHz. Les acteurs qui sont intéressés pour profiter de ces plateformes d’expérimentation 5G ouvertes en bande 26 GHz sont invités à se rapprocher des titulaires des autorisations. Ces derniers sont tenus de publier les conditions d’accès à leur réseau. La liste de ces expérimentations est disponible ici.
Évidemment pour bénéficier de la 5G mmWave, votre smartphone doit être compatible. Pour le moment, il y en a peu et la compatibilité peut varier en fonction du pays pour lequel le terminal est destiné. Par exemple, les iPhone 5G américains supportent la 5G mmWave ce qui n’est pas le cas en Europe.
Attentes et usages
Ce qu’attendent les particuliers de la 5G est une hausse significative de la bande passante descendante disponible (10 à 100 fois plus qu’en 4G) vers leurs terminaux afin de consommer en mobilité des vidéos HD streamées sans coupure, de la musique sans-perte… Concernant la bande passante montante, une hausse de 30% par rapport à la 4G devrait être visible. La 5G n’est donc pas pour le consommateur une révolution mais une évolution logique des capacités des réseaux.
Côté professionnels, la technologie 5G devrait faciliter le déploiement de l’écosystème Internet of Objects (IoT) puisque le réseau pourra répondre aux besoins de communication de milliards d’appareils connectés, avec de bons compromis entre vitesse, latence et coût.
La diminution de la latence est particulièrement cruciale dans l’IoT. Il s’agit du délai entre l’envoi et la réception des informations. De 50 ms en 4G, on passerait à quelques ms avec la 5G si toute la chaîne est optimisée. Le temps de réaction moyen des humains à un stimulus visuel est de 250 ms. On pourrait donc imaginer une voiture connectée réagissant 250 fois plus vite que nous lorsqu’un obstacle est détecté par une autre voiture communicante. À 100 km/h, la distance de réaction est d’environ 30 mètres avant de freiner. Avec un temps de réaction abaissé à 1 ms, la voiture pourrait rouler moins d’un mètre après freinage. Tout cela est théorique mais montre les usages que l’on espère à l’avenir.
La 5G pourrait également marquer l’arrivée d’une quatrième révolution industrielle. Outre l’usage massif de l’IoT, les industriels tablent sur une autre catégorie d’usages : la capacité du « critical IoT » à assurer la continuité de service des applications critiques, en opérant un partage en tranches de la bande passante en fonction des priorités et de la confidentialité (services différenciés ou slicing). L’eMBB (enhanced Mobile Broad Band) engendrera quant à lui des changements concrets pour les opérateurs industriels. Grâce à la vidéo et à l’image, un technicien équipé d’une tablette ou de lunettes VR pourra recevoir en direct les informations nécessaires à la réparation de machines, en étant assisté à distance par un collègue.
Les industriels et opérateurs mondiaux collaborent à l’élaboration des cas d’usage, des standards, des aspects juridiques et commerciaux à travers la 5G Alliance for Connected Industry and Automation (5G-ACIA).
Comment mesurer les performances des ces usages (KPI) ? On utilise pour cela 8 indicateurs :
- capacité en Gbps,
- débit en Mbps,
- efficacité spectrale en bps/Hz,
- vitesse de déplacement du terminal en km/h,
- latence en ms,
- densité d’objets connectés (mobiles ou IoT) en quantité/km2,
- efficacité énergétique du réseau bits/watt,
- débit sur une zone en Mbps/m2.
Notez que la comparaison des KPI entre IMT-advanced et IMT-2020 ci-dessous diffère forcément des constatations observées sur le terrain. Ces indicateurs sont des objectifs absolus établis par l’Union internationale des télécommunications.

On ne peut pas tendre vers le maximum théorique de chaque indicateur simultanément. C’est pourquoi les réseaux 5G seront configurés en « tranches » (slices). Ils seront capables de s’adapter dynamiquement à la demande, en fonction des usages définis par l’Union internationale des télécommunications :
- eMBB (enhanced Mobile Broadband) propose des usages actuellement visés par les déploiements de 5G NSA ce qui nécessite une grande largeur de bande pour les données et une amélioration modérée de la latence. Cela permettra de développer les nouveaux médias et applications AR/VR, l’UHD, la 8K ou la vidéo en continu à 360 degrés… L’efficacité spectrale, le débit maximal et la capacité globale du réseau pourront être atteints au détriment d’autres indicateurs, comme la latence, la fiabilité ou la densité de connexions. Avec cet usage, la connexion devra être efficace à l’intérieur des bâtiments comme à l’extérieur même en bordure de cellule.
- mMTC (massive Machine Type Communications) vise à fournir une connectivité à un grand nombre d’appareils tels que des capteurs qui ne transmettent et ne reçoivent généralement que sporadiquement de petites quantités de données afin de préserver la batterie. Un réseau mMTC est conçu pour être tolérant à la latence, efficace pour de petits blocs de données envoyés sur un canal à faible bande passante. La principale exigence de performance pour un service de réseau mMTC est de supporter une densité de connexion élevée, allant jusqu’à 1 million d’appareils par km2, ce qui est 10 fois la quantité maximale actuellement possible avec la 4G. Par conséquent, le réseau devra concentrer ses ressources pour répondre à toutes les demandes, il ne sera donc pas en mesure, par exemple, d’utiliser aussi efficacement le spectre ou d’assurer une faible latence.
- uRLLC (ultra Reliable Low Latency Communications) prend en charge de nouvelles exigences critiques telles que la conduite autonome pour l’industrie automobile, la consultation médicale voire l’opération à distance et l’automatisation de la robotique pour l’industrie 4.0. Le nombre de communications simultanées, le débit ou encore l’efficacité spectrale peuvent être réduits pour pouvoir assurer une faible latence.
Terminologie et technologies 5G
Je vous propose, à travers cette section, d’aborder la terminologie et les technologiques liées à la 5G de façon la plus complète possible tout en conservant une certaine facilité de compréhension.
Beamforming
L’objectif du Beamforming est d’améliorer à la fois la puissance et la stabilité du signal émis. Sans Beamforming, le signal est diffusé partout, les ondes électromagnétiques se répandent de façon circulaire. Le Beamforming permet de détecter les appareils qui captent le signal et d’uniquement le diffuser dans leur direction. Les antennes 5G comportent de très nombreuses petites antennes miniaturisées permettant de focaliser le faisceau sur une zone donnée. Plus elles sont nombreuses, plus le faisceau principal est focalisé et plus les lobes latéraux sont faibles. Ces antennes d’émission dites « actives » sont alimentées par des signaux identiques, mais déphasés, de façon à concentrer l’énergie émise dans la direction du récepteur (beamsteering). Le Beamforming est disponible pour les fréquences supérieures à 1 GHz.

Concrètement, on utilise le réseau d’antennes MIMO pour orienter et contrôler le faisceau d’onde radio (amplitude et phase du faisceau). On peut ainsi créer des lobes constructifs/destructifs et optimiser une transmission entre l’émetteur et la cible. Les techniques de beamforming permettent à la fois d’étendre une couverture radio (d’une station de base ou d’un point d’accès Wi-Fi par exemple) et de limiter les interférences entre utilisateurs et la pollution électromagnétique environnante (en ciblant le récepteur visé).
L’usage de cette technologie implique donc une efficacité énergétique améliorée concernant la 5G (à quantité égale de données transportées par rapport aux précédentes générations) grâce à l’utilisation d’antennes massive MIMO.
Dynamic Spectrum Switching
Le Dynamic Spectrum Switching, de son sigle DSS, est une technologie qui permet le déploiement de 4G et 5G dans la même bande de fréquences et qui alloue dynamiquement les ressources du spectre entre les deux technologies en fonction de la demande des utilisateurs. Rien de mieux qu’un exemple pour bien comprendre.
Sans DSS, un opérateur qui dispose uniquement de 20 MHz de spectre devrait le diviser en deux afin de couvrir ses clients aussi bien en 4G qu’en 5G : 10 MHz de spectre en 4G et 10 MHz en 5G. Avec le DSS, un opérateur n’a pas besoin de diviser ce spectre ou de disposer d’un spectre dédié pour la 4G ou la 5G. Au lieu de cela, il peut partager ces 20 MHz de entre les deux technologies.

Les opérateurs se reposent donc sur leur infrastructure existante et leur spectre alloué afin d’accélérer le déploiement de la 5G. Il n’y a pas de changement de matériel (sous réserve qu’il soit compatible SDR) puisque l’activation du DSS se fait au niveau des stations de base par le biais d’une mise à jour logicielle déployée par les équipementiers tels que Ericsson ou Nokia. Les têtes radio, les aériens, le raccordement réseau (backhaul) restent communs.
Le débit pour l’utilisateur reste fortement contraint par la faible largeur disponible des bandes basses : dans le cas de la bande 700 MHz attribuée en novembre 2015 par l’ARCEP, le débit descendant sera ainsi limité par les 5 ou 10 MHz dont disposent les opérateurs français, à comparer aux 70 à 90 MHz qu’ils viennent d’acquérir en bande 3,5 GHz ou à la possibilité d’agrégation des porteuses de plusieurs bandes en 4G.
Un minimum de 10 MHz contigus est nécessaire dans la bande pour activer le DSS car celui-ci implique une faible perte de largeur de bande pour piloter le partage entre les technologies 4G et 5G.
5G Non-standalone vs 5G standalone
Afin de réaliser la transition des infrastructures 4G vers 5G, les opérateurs ont deux possibilités. Ils peuvent soit passer par une Non-Standalone Architecture (NSA) ou bien une Standalone Architecture (SA).
En NSA la signalisation de contrôle 5G est dévolue à la station de base 4G, alors qu’en SA la station de base 5G est directement connectée au réseau coeur 5G. En d’autres termes, la NSA revient à ajouter un SSD à un vieil ordinateur, ce qui peut légèrement améliorer ses performances, tandis que la SA revient à remplacer complètement l’ordinateur qui est alors doté de technologies plus récentes et de performances optimales au moment de son installation. Bien sûr son déploiement est moins coûteux que la SA.
Pour le moment, et pour quelques années encore en France, la 5G fonctionnera avec un cœur de réseau 4G. Pour accéder actuellement à la 5G, il faut donc être dans une zone couverte par la bande 5G, mais aussi couverte par la bande 4G d’ancrage portant la signalisation.

Ainsi, la couverture 5G NSA dépend de sa fréquence d’émission (700 MHz sur le schéma ci-dessous), mais aussi de la couverture de la bande 4G d’ancrage. La couverture effective 5G est alors la plus petite couverture entre les deux (couverture à 1800 MHz sur le schéma).

La 5G SA est une architecture entièrement nouvelle définie par le 3GPP. Elle introduit des changements majeurs tels qu’une architecture basée sur les services et la séparation des différentes fonctions du réseau. Son architecture présente l’avantage de proposer un haut débit de bout en bout et un service assuré. Ceci est particulièrement utile pour les opérateurs qui veulent lancer de nouveaux services 5G destinés aux entreprises comme une connectivité pour les villes et usines « intelligentes ».

Massive MIMO
Le Massive MIMO (aussi appelé Large Scale Antenna Systems, Hyper MIMO, Very Large MIMO, Full-Dimension MIMO ou encore ARGOS) est un système rayonnant comprenant un nombre d’antennes relativement élevé (M > 10) au niveau de la station de base (BTS) pour servir un nombre d’utilisateurs K sous la supposition M très supérieur à K. Utiliser autant d’antennes permet un contrôle fin du rayonnement global. Les K utilisateurs peuvent avoir plusieurs antennes dans leurs terminaux. Cette solution est souvent associée à des techniques multi-utilisateurs en raison de son potentiel à focaliser l’énergie vers plusieurs positions particulières de l’espace. Un système Massive MIMO permet théoriquement de diviser la puissance radio nécessaire à l’obtention d’une même qualité de service qu’un système Single-Input Single-Output system (SISO) par un facteur proportionnel au nombre d’antennes du système. Le modèle d’un système Massive MIMO est proche de celui du Multi-user MIMO déjà utilisé en 4G LTE-Advanced et en Wi-Fi 802.11n ou supérieur.
Liens utiles
- Carte des antennes et des mesures relevées en France : https://www.cartoradio.fr
- Demande de mesures du champ électromagnétique pour les particuliers et organismes habilités (collectivités territoriales, associations agréés de protection de l’environnement, fédérations d’associations familiales…) : https://mesures.anfr.fr
- Carte de la couverture et de la performance des réseaux d’opérateurs toutes technologies confondues : https://maconnexioninternet.arcep.fr
- Carte de la couverture des réseaux fibre FttH : https://cartefibre.arcep.fr
Sources
- https://www.arcep.fr
- https://www.anfr.fr
- https://www.sfr.fr
- https://wikipedia.org
- https://www.frandroid.com
- https://www.qualcomm.com
- https://gsacom.com
- https://www.alepo.com
- https://www.orange-business.com
- https://www.gigabyte.com
- https://www.metaswitch.com
- Thèse d’Antoine Roze « Massive MIMO, une approche angulaire pour les futurs systèmes multi-utilisateurs aux longueurs d’onde millimétriques »